Pour la première fois dans la France contemporaine, quatre cents candidates et candidats issus de l'immigration, surtout nord-africaine, se sont présentés aux élections législatives en juin 2012, principalement dans des circonscriptions populaires. Gilles Kepel, aidé par l'Institut Montaigne, a «zigzagué l'Hexagone» entre janvier 2013 et janvier 2014 pour en rencontrer une centaine.
Pourquoi et comment ont-ils choisi d'entrer en politique afin d'incarner la souveraineté du peuple français? Avec pour matériau le Journal de ces voyages et le verbatim de ces entretiens, Passion française saisit un état de crise sociale et politique sans précédent, qui voit les polémiques sur l'identité française et l'islam, sur l'exclusion et le rejet du «système» battre leur plein, tandis que le Front national rafle la mise, y compris, au-delà du paradoxe, dans certaines cités.
Gilles Kepel polarise son récit sur deux régions emblématiques : Marseille et ses quartiers nord, Roubaix, la ville la plus pauvre de France, l'une et l'autre héritières d'une riche culture ouvrière. Dans les deux cas, il observe la prégnance des marqueurs de l'islam dans le tissu social et les aspirations démocratiques de la jeune génération.
Passion française peut dès lors se poser en diptyque avec Passion arabe : l'interpénétration de l'Afrique du Nord et du Proche-Orient avec nos banlieues pose, outre la question de l'islam de France, celle de l'identité que se cherche notre République dans les bouleversements du monde.